Une période de crise est souvent l’occasion de tenter de nouvelles expériences et de saisir des opportunités tant sur le plan humain que sur le plan professionnel. La pandémie de COVID-19 a poussé la communauté universitaire à sans cesse se réinventer mettant indéniablement à l’épreuve ses capacités de résilience. Ainsi, la distanciation généralisée et brutale des enseignements a prouvé la capacité de notre Institution à s’adapter en un temps record à un environnement déroutant.

Si individuellement, les enseignants n’ont pas tous été égaux par rapport à cette mise à distance et à la dématérialisation des enseignements, des équipes techniques et pédagogiques présentes à l’ULiège (CARE Outils numériques | Digital tools, IFRES, SEGI, UDI, eCampus…) ont pu accompagner ce basculement. Dans l’urgence, celles-ci ont renforcé les capacités des systèmes préexistants (infrastructure informatique, serveurs, stockage de données, plateformes de podcasts, d’e-learning, de visioconférence…) et produit les outils pédagogiques d’aide à la décision ainsi que les modules de formation à destination des enseignant·e·s et des étudiant·e·s (y compris à destination des étudiant·e·s étranger·ère·s). Ces usages du numérique ont permis la mise en place d’une forme d’emergency remote teaching (ou enseignement en ligne d’urgence). De multiples initiatives ont vu le jour (formations à distance, espaces de discussion, classes inversées, espaces virtuels d’entraide via des forums, etc.), mais ces solutions envisagées dans l’urgence ont parfois conduit à une juxtaposition des outils mobilisés et une complexification de l’environnement numérique universitaire.

Ces changements brusques et sous contraintes ont aussi révélé les impacts négatifs sur le bien-être de tous comme la fatigue cognitive, l’isolement social, les difficultés de gestion du temps et la mise à mal des règles éthiques quand une communication est utilisée en dehors de son contexte. La crise sanitaire a aussi rappelé en négatif l’importance du plaisir d’apprendre et d’enseigner, des relations en présentiel et de campus animés tout en soulignant la persistance d’inégalités préoccupantes particulièrement identifiables dans l’accès au matériel informatique et à des conditions de travail approprié à l’enseignement à distance.  

Cependant, les raisons qui amènent l’ULiège à se doter aujourd’hui d’une « stratégie numérique » vont bien au-delà des réponses à la crise sanitaire que nous venons d’évoquer. Le numérique transforme en profondeur nos sociétés. Cette métamorphose numérique est avant tout une transformation radicale du réseau d’échange sur lequel nos sociétés construisent, partagent et utilisent les connaissances. Ceci constitue une situation nouvelle qui questionne en profondeur le rôle et les capacités d’un champ universitaire par ailleurs impacté par des changements profonds de longue date (telle que la massification de l’enseignement) ou plus récent (réforme du décret paysage…).

Si l’Université doit toujours être appréhendée comme le lieu d’émergence et de partage des savoirs, le numérique transforme désormais son écosystème :

  • Il facilite le transfert et la diffusion des connaissances en donnant à tout le monde un accès virtuellement instantané et « illimité » aux connaissances. Ce faisant, il modifie profondément le rôle de la mémoire dans les apprentissages. Malheureusement, cette masse énorme d’information n’est pas associée à un label de qualité scientifique et les fake news coexistent dans l’espace public avec les informations élaborées sur la base de résultats scientifiques.
  • Il permet une désynchronisation et une délocalisation de l’enseignement et des apprentissages et force ainsi le monde académique à se questionner sur la pertinence, documentée du point de vue pédagogique, du choix du présentiel et du distanciel dans l’organisation de nos enseignements. Ce faisant, les outils numériques participent dans le cadre d’un usage pertinent au renforcement de la qualité de nos enseignements.
  • Il interroge également le bien-fondé de certaines pratiques (par ex. la participation physique à des colloques et jurys de thèse internationaux) dans un contexte de crise climatique.
  • Il facilite l’échange des bonnes pratiques et modifie les relations apprenants-apprenants, apprenants-enseignants, enseignants-chercheurs et enseignants-professionnels.
  • Il permet l’autonomie, la flexibilité des apprentissages, mais comporte des risques pour la vie sociale et la santé.
  • Il augmente les possibilités d’apprentissage par expérience via les plateformes de simulation, de jeu, de réalité virtuelle et d’échanges de pratiques.

Dans ce contexte évolutif et sans doute même « révolutionnaire », les autorités ont initié une réflexion sur la stratégie numérique dans l’enseignement auprès de tous les utilisateurs : étudiant·e·s, enseignant·e·s et personnel administratif et technique. Une large consultation auprès des facultés et s’adressant aux différents utilisateurs des outils numériques a été lancée sous l’impulsion de la vice-rectrice à l’enseignement, du Conseil universitaire de l’enseignement et de la formation et du Conseil stratégique du numérique dès le mois de mai 2021.  

Ce processus consultatif a préparé les Assises de l’enseignement du 28 septembre 2021 portant sur la place du numérique au sein de l’enseignement universitaire de demain. Les données recueillies (enquêtes auprès des enseignant·e·s comme des étudiant·e·s, expériences antérieures, bilan collectif, projections, journée de travail) ont conduit à l’élaboration d’un document, ensuite partagé avec les autorités universitaires, facultaires et les services communs, permettant à chacun de s’associer à la réflexion et à l’élaboration du plan. Cette large consultation a permis d’asseoir une stratégie numérique qui tient compte des principaux axes d’activités numériques d’enseignement conduits dans l’Institution comme ceux à développer.  

Ce plan servira aux autorités à fédérer les ressources internes de l’institution autour de sa stratégie numérique et à déterminer ou ajuster annuellement les ressources allouées à chaque initiative dans la mesure où celle-ci répond aux objectifs institutionnels.

Ce plan concerne le recours aux outils numériques pour l’enseignement. Il ne traite pas des transformations des objets et des contenus de l’enseignement qui seront rendues nécessaires ou impulsées par la « numérisation » de la société en général et des activités créatives et productives en particulier. Cette deuxième facette de la numérisation dans l’enseignement fera l’objet d’un travail mené avec les facultés.

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